SUZUKI GT 750 : la méprise

Coincée entre 2 icones, la 750 Four ( déjà essayée dans la Moto Classic ) et la 750 H2 (également) , la Suzuki 750 GT était une bonne machine incomprise à sa sortie. Un 2-temps pour le grand tourisme ? Impossible !

Eau et gaz à tous les étages.

Après le proto dévoilé en 70 au salon de Tokyo, la GT 750 arrive en 72 avec un argument technique inédit : le refroidissement liquide . Bloc cylindres dépourvu d'ailettes, mano de température, et énorme radiateur doté d'un ventilateur ! C'est la première moto de série ainsi équipée ( si l'on excepte la Scott de 1930 ). Cette technologie vient directement de la course, pourtant elle ne sera pas une moto sportive . Et c'est un énorme moteur 2 temps, technologie à laquelle Suzuki est attaché.Pourtant elle ne sera jamais violente .

Le paradoxe commence là .

Opposée de conception à la 750 H2, la GT est une ....GT ! Pas une machine de sport, plutot un vaisseau long courrier, à l'équipement fourni, avec 4 échappements ( le pot du cylindre central est dédoublé pour ressembler à la 4 pattes Honda) et bourrée de chromes. Du luxueux ! Mais on n'imaginait pas un 2 temps dans ce role là quoi qu'il arrive !

Tout de suite, le tambour avant fait tache. Vieillot au milieu d'arguments technique plus modernes il sera un ...frein pour la carrière commerciale du modèle la première année.

Le schéma moteur est assez simple : un twin T 500 auquel on adjoint un cylindre de plus ( alésage x course identiques ) . Mais pour éviter le problème de l'échauffement du cylindre central, Suz envoie l'eau à tous les étages donc !

Les diagrammes de la GT sont sages et 67 chevaux sortent du bloc. Les fans de 2 temps attendaient plus !

En fait la GT n'est pas profilé comme une moto sportive, et tous ses équipements le montrent  : ventilateur, démarreur électrique, gros garde boues, gros feux, etc ... . Conçue avec soin , elle s'avère lourde, 240 kg !

Bouillotte, Water Buffalo, Keettle

Avec son refroidissement liquide, la GT reçoit vite des surnoms : Bouillotte ici, Chauffe eau là ....

La GT est massive et attire l'oeil encore aujourd'hui . Un aspect cossu qui vient de son bloc moteur alu, ses chromes, ses peintures candys, sa qualité de fabrication.

Au premier coup de démarreur, le moteur démarre facilement, avec un son proche de celui d'un moteur de hors bord. Tous les sons parasites sont absorbés et seule la mélodie glougloutante du 3 cylindres rythme les bas régimes.  Le coup de gaz à vide révèle une inertie moteur marquée.

Embrayage doux, position en avant, dos droit avec le petit guidon ( il existe un grnad guidon type cornes de vaches plus propice à la maniabilité ) on passe la première et clonk .  La transmission est bruyante.

On décolle aisément sur le filet de gaz, dans un véritable nuage bleu ! Et dire qu'à l'époque ils la trouvaient déjà trop " expressive ) imaginez aujourd'hui ! La souplesse et l'absence de vibrations sont impressionnantes ! Vous pouvez ouvrir les gaz à 2000 tours en 5ème, ca repartira toujours avec force.

La moto est lourde, mais sa direction est assez neutre.  Les amortisseurs d'origine ( pour ceux qui les ont encore ) sont trop raides !

Les rapports passent les uns après les autres, la boite est bien plus douce à partir du second rapport, la vitesse augmente, vous roulez sur le filet de gaz au son envoutant du 3 cylindres 2 temps ....une véritable moto haut de gamme, incomprise à l'époque pour son absence de sauvagerie

La reine du long cours.

Plus encore que la 750 Four, la GT est véritablement destinée au long cours.  Le refroidissement liquide est un gage absolu de fiabilité ( et de fait la GT est en béton ) et la transmission finale longue n'oblige pas à rouler dans les tours surtout avec la disponibilité du moteur .

Finalement c'est bien l'anti thèse parfaite du 2 temps creux, violent, mal élevé et fragile !

Sous cet aspect là le pari de Suzuki est réussi, sous l'angle commercial c'est plus mitigé.  Le freinage de la première version aura été un vrai handicap. Bonnet ( l'importateur Français ) changera pour les disques en échange standard, mais c'est dommage car la machine est mal " arrivée". ( aujourd'hui ce sont évidemment les versions les plus recherchées ). C'estle cas de notre moto d'essai. C'est bien une J de 72, mais elle a le train avant à disques.

Le chassis peu agile, pas sportif ne la classe pas dans les betes de course, meme si la version TR ( et l'accident de Barry Sheene à Daytona ) est devenue une légende en formule 750 .

La GT 750 restera 5 ans au catalogue, avec de miltiples évolutions, dont l'apparition de carburateurs à dépression et des diagrammes plus méchants pour se rapprocher dela H2, au prix d'un caractère plus pointu .

Aujourd'hui la conduite de cette machine est vraiment un immense moment de plaisir. Avec ce gros 2 temps rond et disponible, vous roulez à bas régimes et les volutes bleues décorent la vision de vos rétros. 

A 3000 vous ouvrez en grand, elle allonge et le bruit rauque s'amplifie . Inutile  de chercher à prendre les derniers régimes, ce n'est pas là qu'elle est la plus expressive.

Sortez de la ville elle n'y est pas à l'aise, prenez une départementale, et au rythme de 8L/100 profitez de cette motorisation suave.  Pour obtenir autant de régularité et de douceur il vous faudra chercher longtemps ! Un 3 cylindres 2 temps a la même régularité qu'un 6 en ligne 4 temps .....du velours !

Et tant pis si elle n'a rien d'écologique !