Spécialiste des motos sportives, Yamaha va étonner et séduire toute une génération avec la FJ 1100. Cette grosse cylindrée va apporter une touche de sportivité à la catégorie des motos de tourisme : en fait, elle ne fait rien de moins que créer le concept de sport GT, et elle le fait fort bien !

125 chevaux pour le tourisme

1984, la loi des 100 chevaux n’existe pas encore. Yamaha a déjà conçu un gros moteur de 1100 avec la XS en 1979, il flirte avec les 95 ch. Avec la nouvelle FJ, la firme doit surprendre car son concept est celui d’une GT très sportive, au potentiel devant être remarquable. Il faut passer largement la barre des 100 chevaux !

L’Europe est devenue un marché très important pour les marques japonaises. Et Yamaha le premier va comprendre l’intérêt de produire des modèles adaptés aux attentes de ce marché. La FJ est imaginée par une équipe basée à Amsterdam dont l’ancien rédacteur de Moto Journal, le Français Francois-Marie Dumas, fait partie. Bingo, la FJ va satisfaire une demande parfaitement identifiée par cette équipe du Product Planning. Celle d’une moto à la croisée des performances pures et de la facilité de conduite au long cours, entre vivacité, stabilité et protection.

Pour chasser les hautes performances, le 4-cylindres va hériter d’une culasse 16 soupapes, de carbus à dépression assez élaborés, la boîte est d’un nouveau type à 3 arbres. 125 chevaux à 9000 tours sont promis, du très haut niveau pour l'époque ! Le sommet ! L’alternateur va migrer derrière le banc de cylindres pour favoriser son étroitesse. Moteur hautes performances, le FJ 1100 reçoit un petit radiateur d’huile, mais le moteur est refroidi par air.

Elle est présentée au salon de Paris fin 1983 en compagnie de la 500 RDLC. Inutile de dire que le stand Yam crée une très grosse attraction !

La FJ est luxueuse, sa ligne innove avec une tête de fourche et un becquet arrière taillés par le vent, ainsi qu’un sabot moteur aux lignes pointues pour l’aérodynamisme. La FJ est longue et basse, sa ligne ne ressemble à rien d’existant ailleurs !

Avec ses 125 chevaux, elle fait fantasmer et ressemble à un TGV à deux roues, sûr qu'elle va prendre 240 compteur se disent tous les observateurs ! D'ailleurs, son bloc d'instruments intégré dans le carénage a tout de celui d'un avion.

Mais la FJ n'est pas qu'un moteur, loin de là !

Un châssis inédit

Pour répondre à son objectif de polyvalence et de hautes performances absolues,  la FJ va inaugurer un châssis digne des sportives les plus pointues. Yamaha a souvent excellé dans la qualité de ses parties cycles, y compris en innovant, la FJ en est une illustration.

Pour être facile, stable et sécurisante, la FJ 1100 adopte un cadre périmétrique inédit, réalisé en tubes de section carrée, qui entoure moteur et colonne de direction, et c'est là sa principale particularité. Ses deux poutres enserrent le gros 4-cylindres. Largement inspiré de certaines créations ultra sportives de Bimota, ce “Lateral Frame Concept“ abaisse le centre de gravité (et la position de conduite au bénéfice du contrôle du pilote) et augmente la rigueur de la partie cycle. L’idée maîtresse est de faciliter la vie des gros rouleurs en donnant de la précision de conduite à cette grosse moto aux performances élevées. La large fourche télescopique de 41 mm de diamètre est réglable en détente, compression et elle reçoit un système anti-plongée (lui aussi réglable). A l’arrière, un mono-amortisseur réglable sur 5 positions est activé par des basculeurs de type Monocross. 

Lourde (227 kg à sec) et rapide, il faut savoir s'arrêter. Les trois disques présentent eux aussi une caractéristique particulière avec une ventilation axiale novatrice. Il faut impérativement évacuer les calories au freinage.

Enfin, la définition du projet a opté pour des roues de 16 pouces afin d'améliorer l'agilité de la partie cycle. Un large pneu arrière va se débrouiller pour passer au sol la cavalerie abondante, et la roue avant va faciliter l'inscription en virage. C'est, sur le papier, un innovant schéma idéal !

Chaque point de la FJ répond à un besoin, la preuve : il y a même des crochets pour arrimer des sandows ou des sangles de bagages au niveau du dosseret ! Tout a été réfléchi.

Docile en force

Dès le premier contact, la FJ est facile. Basse, avec une position de conduite très ergonomique, ses demi-guidons habilement placés, on s’y sent vite à l’aise. Le démarreur tourne lentement mais le gros moteur démarre sans se faire prier avec l’aide du starter au guidon. 

Première enclenchée et l’embrayage hydraulique souple vous aide à partir sur un filet de gaz microscopique. Immédiatement, on comprend que le moteur a une force peu commune. Il est plein avec un couple maxi de plus de 10 mkg ! Souple, il vous pousse sans faille d’une grosse main dans le dos, et la moindre rotation vous propulse littéralement. Un moteur qui sera un vrai caviar dans le cadre d’une utilisation tourisme avec sa capacité à repartir avec 2 vitesses de trop tant sa force et son couple sont omniprésents. Un énorme élastique !

La boîte 5 est bien étagée et la FJ prend de la vitesse avec ce côté rond et souple des gros 4 cylindres de caractère. Mais, passé 7000, les 16 soupapes se rappellent à votre bonheur avec vigueur. Les 125 chevaux qui hurlent à 9000 tours vous collent au mur !  Diable ça pousse très fort pour une moto de 30 ans passés, et les premiers exemplaires avant la loi des 100 chevaux offraient de sacrées performances au sommet de la catégorie des sportives. Là, on est franchement sport et pas du tout GT !

Heureusement, la carrosserie étudiée en soufflerie de la FJ vous protège bien. Les genoux sont encastrés dans les échancrures du réservoir, la selle est creusée pour vous caler lors des grosses accélérations. La FJ est rapide mais ultra prévenante, avec une bulle au design superbe de finesse et à l'efficacité remarquable !

Stable et maniable à la fois

La FJ avait été imaginée pour tout faire. Aller au bureau en ville, poursuivre les sportives de l'époque, et traverser l’Europe avec passagère et bagages !  Et elle s’en sort bien.

Pour supporter la grosse cavalerie et le couple instantané du 4 cylindres, il faut un super châssis. Le Latéral Frame Concept est une innovation réussie. Il est rigide, on le sent bien, et la moto se place sans gros efforts, mais surtout elle se place fidèlement. Vous visez, elle exécute ! Pour une grosse machine c'est appréciable. Les suspensions étaient hyper confortables, on les trouverait même trop souples de nos jours.

Quel que soit le rythme (et il devient vite rapide), l’étonnant compromis agilité – stabilité s'impose. La FJ est bien plus facile à emmener qu’une 750 GSXR (qui sortira un an plus tard) pourtant bien plus légère. Et même à très haute vitesse elle reste en permanence ultra sécurisante sans mouvements parasites (notre moto de 61 000 km avait troqué ses suspensions d'origines pour des ressorts de fourche et un amortisseur Hagon). Evidemment, ce n’est pas une danseuse de bal et les changements d’angles se font avec un peu d’anticipation, mais les deux roues de 16 pouces en font une machine agile pour son gabarit, et son châssis se révèle précis : les deux objectifs opposés sont réunis ! On peut cruiser ou piloter selon l'humeur, la FJ sait tout faire.

Prête à tout faire

Un gros moteur souple ET puissant. Un châssis facile ET stable. La FJ, c’est l’art de la maturité. Une moto qui vous protège, qui vous emmène vite et loin, c’est l’archétype de la sport GT ultra polyvalente.

On comprend mieux en l’essayant de nos jours qu’elle se soit si bien et si longtemps vendue (en version 1100 d’abord à partir de 1984 puis en 1200 jusqu’en 1996 soit 12 ans de carrière !).

Elle a eu ses fans, qui ont longuement attendu de trouver une remplaçante à leur FJ adorée. La FJR plus typée GT que sport GT n’aura pas vraiment repris le flambeau dans la gamme.

Ultra complète et unique

La FJ est une sorte de chef d’œuvre, une moto polyvalente, classieuse, efficace. Sa ligne est finalement assez intemporelle et la définition de son concept a donné une des machines les plus abouties de cette catégorie sport GT toutes générations confondues ! Etonnante encore aujourd’hui, c’est dire si son potentiel était élevé et en avance à sa sortie !

Les plus
  • Couple
  • Polyvalence
  • Stabilité châssis
  • Icone des années 80
Les moins
  • Souvent fortement kilométrée
  • Plastiques incomplets avec l'âge
  • Pots d'origine introuvables
Équipement
  • Mono amortisseur
  • Suspensions réglables
  • Jauge à essence
  • Poignée passager
  • Crochets de fixation pour sangles des bagages
Vidéo: